Après s’être fait refuser pour une sixième fois un visa de visite au Canada pour son mari cubain, une Québécoise travaillant et vivant sur l’île socialiste peste contre les décisions du gouvernement fédéral, qu’elle juge aléatoires.
Le mari de Nathalie Langlois, Juan Carlos Osorio Guzman, s’est fait refuser à six reprises par Immigration Canada une demande de visa de visiteur. La plupart du temps, les raisons évoquées étaient pour des motifs «ridicules», soutient le couple.
«Nous ne pouvons porter la décision en appel, même si l’immigration a tous les documents nécessaires. Ils peuvent dire le contraire dans la lettre de refus sans aucune conséquence», a pesté la productrice de contenu artistique québécois en sol cubain. Chacune des demandes coûte 100 $. Environ 30 % des Cubains qui font une demande réussissent à obtenir ce visa.
Cette fois, le Canada a décliné la demande pour une visite de deux mois prévue d’août à octobre. Le couple évoquait des raisons d’affaires, en plus de vouloir visiter la famille de Nathalie qu’il n’a jamais rencontrée. «Le Journal de Québec» a pu consulter le dossier complet.
Arguments
En réponse aux questions du «Journal», Immigration Canada a souligné que «les agents de migration ont noté que M. Osorio Guzman n’a pas démontré un historique de voyage, de solides liens socio-économiques avec Cuba, en plus de ne pas avoir fourni de preuve de fonds pour couvrir son séjour au Canada».
Les agents de migration, qui ont un pouvoir discrétionnaire, n’étaient pas convaincus que M. Osorio Guzman quitterait le Canada à la fin de la période de séjour autorisée.
Un argument que réfute le couple. Compagnie, famille, compte de banque garni, contrats futurs, demandes de coopérative, preuve de résidence, déclaration de revenus: «Tous les documents réclamés y étaient», s’indigne Mme Langlois, qui a également fait appel au ministre Jean-Yves Duclos, en vain.
Vivre là-bas
En couple depuis cinq ans, ils se sont mariés en 2015. Mme Langlois a obtenu son statut de résidente sur l’île des Caraïbes afin de ne plus vivre séparée de son mari.
«Nous avons fait le choix de ne pas faire une demande d’immigration au Canada, car nous possédons deux entreprises à Cuba qui fonctionnent très bien», explique-t-elle.
Juan Carlos est propriétaire d’une entreprise particular cubaine de réparation de système de refroidissement qui fonctionne à plein régime. Il gagne très bien sa vie, en plus de fournir le gagne-pain à plusieurs Cubains. Il a par ailleurs conclu avec l’État de nombreux contrats qui devront être réalisés dans les prochains mois.
Il collabore aussi au magazine canadien Cubaplus. C’est notamment sur l’invitation de l’entreprise canadienne que Juan Carlos a fait sa demande de visite au Canada. «Mon mari n’a aucune raison de ne pas revenir à Cuba», a affirmé Mme Langlois.
Quant à elle, les projets artistiques entre Cuba et le Québec se multiplient. En raison du travail, elle doit se rendre au Québec fréquemment.
«Tout ce que l’on demande, c’est que mon mari puisse aussi venir avec moi lors de mes séjours obligatoires au Canada», plaide-t-elle, comprenant que les autorités canadiennes peuvent être méfiantes lorsqu’il s’agit d’une demande pour un jeune couple. Elle fait ainsi référence aux nombreuses histoires d’horreur de Cubains qui ont pris la fuite une fois la frontière traversée.

Un pouvoir discrétionnaire
L’avocat spécialisé en immigration, Patrick-Claude Caron, explique qu’il existe un recours coûteux pour les demandeurs de visa qui sont refusés.
Qui décide de l’octroi d’un visa de visite au Canada?
C’est le pouvoir discrétionnaire de l’agent d’immigration qui examine la demande. Et le pouvoir discrétionnaire, c’est super large. C’est basé sur certains critères d’application. Ce pouvoir discrétionnaire, il est très puissant. Et, habituellement, un agent évitera de prendre un risque.
Quel genre de dossier est le plus susceptible d’être accepté?
Il faut démontrer que la personne va effectivement retourner dans son pays une fois le séjour terminé et l’objectif du séjour accompli. Le meilleur cas, c’est la personne qui est propriétaire de sa maison, qui a un conjoint, qui va avoir des enfants, qui va avoir un boulot et des employés. Bref, une situation où l’ancre du bateau est tellement bien enfoncée dans le sol que c’est impossible d’imaginer que l’individu abandonnera ça.
Quel recours ont les gens lorsqu’ils font face à un refus?
Techniquement, dans un contexte comme celui-là, le seul droit qu’une personne a lors d’un refus, c’est d’aller devant la Cour fédérale. Et ça, c’est sur autorisation. On doit demander à la Cour fédérale du Canada la permission de se présenter à la Cour en disant que la décision qui a été prise sur le visa n’est pas bien fondée, mais sur des motifs de révision judiciaire. Ce n’est pas un appel de la décision. C’est plutôt une demande pour dire que le décideur a agi de manière déraisonnable dans son approche.
Faut-il payer pour user de ce type de recours?
Aller en Cour fédérale, à moins vraiment d’avoir un dossier qui donne droit à l’aide juridique, c’est très dispendieux parce que c’est une procédure très lourde à préparer. Ce que ça signifie, pour une demande qui coûte quelques dizaines de dollars, eh bien, on se ramasse avec des frais juridiques, pour aller attaquer cette décision-là, de quelques milliers de dollars.
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